28 COP plus tard
La COP28 à Dubaï, c’est terminé ! Comme pour la COP27, c’est l’heure du bilan.
Édito
Tout d’abord, la COP c’est quoi ? Ça signifie Conferences Of the Parties et consiste à limiter les émissions de gaz à effet de serre d’origine humaine afin de lutter contre le réchauffement climatique.
La COP26 avait été abondamment critiquée, notamment avec l’arrivée en jet de Jeff Bezos, Saint patron d’Amazon pour nous expliquer que la Terre était fragile et qu’on se devait de la protéger. la COP27 donnait l’impression d’un goût amer, avec un bilan très moyen et beaucoup de questions laissées en suspend.
Pertes & dommages, on y est ?
Les officiels réunis à Dubaï ont finalisé d’entrée de jeu la mise en œuvre d’un fonds qui aiderait à indemniser les pays vulnérables qui luttent pour faire face aux pertes et aux préjudices causés par le changement climatique. C’est une avancée majeure – sur le papier – au premier jour de 28ème COP.
« J’appelle les dirigeants à apporter des contributions généreuses et à faire démarrer le Fonds et la Conférence sur le climat sur des bases solides »
António Guterres, à la COP28
Ce fond est très important et très attendu puisqu’il met en avant la nécessité d’aider les pays en voie de développement à s’armer contre les effets du changements climatiques.
Plusieurs pays ont annoncé mettre une sommes d’argent conséquente (< à 1 milliard de dollars), mais les montants sont insuffisants, comme le rappelle Tosi Mpanu-Mpanu, négociateur climat en RDC.
« Lorsque l’on prend les 55 pays les plus vulnérables, au cours des deux décennies qui se sont écoulées, environ 580 milliards de dégâts ont été subis par ces pays à cause de ce changement climatique. Et l’on pense que si le changement climatique continu dans sa trajectoire actuelle, d’ici à 2030, ces 580 milliards accumulés sur 20 ans pourraient être le montant annuel auxquelles les pays doivent faire face en termes de dégâts suite aux aléas climatiques. »
Tosi Mpanu-Mpanu, négociateur climat en RDC
Cette COP est essentielle pour deux raisons : Elle est un jalon « bilan » de la COP21 (Le fameux Accord de Paris sur la limitation à +1.5°C de réchauffement climatique) et elle est également à un tournant de la prise de conscience mondiale. Antonio Guterres nous le rappelle, d’ailleurs :
Vers une gestion équitable des minéraux essentiels à la transition énergétique
Sortir des énergies fossiles va nécessiter une transition énergétique. Pour ça, il est évident qu’il faudra un nombre conséquent de minéraux, essentiels à la fabrication des différents outils de décarbonation et énergies bas carbone.
Les énergies « vertes » ont le vent en poupe, mais une gestion catastrophique des matières premières risque d’exacerber les conflits géo-politiques ainsi que les problèmes socio-environnementaux, comme le rappelle très justement le chef de l’ONU.
« L’extraction de minéraux essentiels à la révolution de l’énergie propre – des parcs éoliens aux panneaux solaires et à la fabrication de batteries – doit se faire de manière durable, équitable et juste »
Antonio Guterres, chef de l’ONU
Il a ajouté que la demande de minéraux, tels que le cuivre, le lithium et le cobalt, devrait être multipliée par près de quatre d’ici à 2030.
Pour tout savoir sur ce sujet, c’est par ici que ça se passe.
Changement climatique partout, justice nulle part
Lire aussi : La COP28 est-elle la plus autoritaire de tous les temps ? [Source : Vert, le média qui annonce la couleur]
Dans un pays à la liberté d’expression plus que limitée, difficile pour les militants de se faire entendre. Pourtant, des voix s’élèvent, comme Zakira Bakhshi qui souhaite évoquer le sort des femmes afghanes, Licypriya Kangujam, 12 ans, qui a montré son courage en montant sur scène pour demander la sortie des énergies fossiles. A 8 ans, elle était déjà à la COP25 de Madrid… Si une enfant de 8 ans peut comprendre l’intérêt de sortir des énergies fossiles, nos dirigeants le peuvent aussi. Encore faut-il le vouloir !
Here is the full video of my protest today disrupting the UN High Level Plenary Session of #COP28UAE. They detained me for over 30 minutes after this protest. My only crime- Asking to Phase Out Fossil Fuels, the top cause of climate crisis today. Now they kicked me out of COP28. pic.twitter.com/ToPIJ3K9zM
— Licypriya Kangujam (@LicypriyaK) December 11, 2023
Vous pouvez lire l’essentiel du mouvement des femmes à la COP28 ici : à la COP28, les femmes et les défenseurs du climat unis pour le changement.
A lire aussi : Faut-il être féministe pour être écolo ?
L’efficacité des initiatives d’anticipation
Le PAM (Programme Alimentaire Mondial) de l’ONU a mis en garde les membres de la COP28 sur l’insécurité en Afrique de l’Est. le pays est actuellement ravagé par des inondations, exacerbées par le changement climatique. Et soyons clair : Les pays en Afrique de l’Est ne sont pas responsable du changement climatique. Une raison de plus d’intégrer la dimension « justice sociale » dans toute lutte environnementale.
Les initiatives d’anticipation, évoqués dans le dernier rapport du GIEC, portent leurs fruits puisqu’en Somalie et au Burundi, 230.000 personnes ont pu atténuer les conséquences des inondations en étant prévenu à l’avance et en obtenant une aide financière, leur permettant de déménager ou d’acheter des fournitures de première nécessité.
« Nous devons rompre le cycle sans fin des crises et réagir par une action climatique axée sur la préparation et la protection avant que les chocs prévisibles ne frappent »
M. Dunford, responsable régional du PAM en Afrique de l’Est
L’agriculture en figure de proue ?
Transformer les systèmes agroalimentaires en puits de carbone, en voilà une idée qu’elle est bonne !
L’agriculture est responsable d’une quantité phénoménale de gaz à effet de serre (sans parler de la pollution, les pesticides ou encore la maltraitance animale). C’est pourquoi travailler sur ce secteur est primordial.
Et ça tombe bien : la FAO a identifié 10 domaines prioritaires, de l’élevage aux sols en passant par l’eau, les cultures, les régimes alimentaires ou encore la pêche.
Le but est d’endiguer la faim dans le monde sans dépasser les +1.5°C d’augmentation des températures dans l’atmosphère. Exercice difficile, quand on sait que 800 millions de personnes sont en insécurité alimentaire dans le monde et que le changement climatique va augmenter fortement ce nombre dans les décennies à venir…
Conference Of the Petroleum
Près de 2500 lobbyistes des énergies fossiles sont présents lors de cette COP28 à Dubaï. C’est 4x plus que lors de la COP27, où 636 lobbyistes ont été recensés par des ONG. Même l’OPEP, l’organisation des pays exportateurs de pétrole est monté au créneau.
L’OPEP a exhorté cette semaine ses membres à saboter toute déclaration finale sur la sortie des énergies fossiles à la COP28. Etonnant ? Pas tellement. C’est un peu comme si les bouchers refusaient que tous les repas passent végétariens… On touche leur gagne-pain.
Mais c’est un excellent signal : le poisson se débat hors de l’eau ! L’OPEP a peur, elle sent le vent tourner.
Non, il n’y a rien d’historique dans l’accord trouvé à la COP28 !
Les médias le relaient depuis quelques heures : ACCORD HISTORIQUE POUR UNE TRANSITION ENERGETIQUE HORS DES ENERGIES FOSSILES.
Spoiler alert : C’est absolument faux. Il suffit de lire l’accord final ici (en anglais) pour s’en rendre compte. Les termes sont clairs :
- On propose aux pays de faire des efforts, on n’impose pas.
- On propose d’accélérer les efforts de réduction de l’énergie produite à partir de charbon et dont les GES ne seraient pas capturées et stockées. (via des CCAS)
- On parle de CCAS (capture et stockage de carbone) à tord et à travers.
- Et bien évidemment, pas de « phase out » (sortie) ni de « phase down » (réduction) des énergies fossiles, mais plutôt du « transitioning », ouvrant la porte au GNL (gaz naturel liquéfié, une source d’énergie fossile donc et nouvel eldorado de certains pays, les USA en tête)
Plus aller plus loin, l’excellent article de Bon Pote qui détaille cette partie : COP28, qui aurait pu prédire une telle issue ? [Source : Bon Pote]
La dernière COP ?
Alors, dernière COP où l’on pouvait espérer quelque chose ou bien dernière COP avant un changement drastique, au vu de l’échec évident de celle-ci ? Entre les conflits d’intérêt, le lobbying, le muselage des militants… Peut-on exiger une COP29 digne de ce nom, au regard des enjeux actuels ?
Chacun aura son avis sur le fait que cette COP28 est une avancée majeure ou non, tout comme c’était le cas pour la COP27.
Cette COP protège encore et toujours les intérêts pétroliers et gaziers à l’heure où nous n’avons plus le temps pour les projets climaticides.
On se retrouvera l’année prochaine pour la COP29 du 11 au 22 novembre 2024 à Bakou, capitale de l’Azerbaïdjan. Pays lui aussi très exportateur de gaz et de pétrole…
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