On va tous mûrir bannière
illustration ecoféminisme

Faut-il être féministe pour être écolo ?

Faut-il être féministe pour être écolo ?

Faut-il être féministe pour être écolo ?

Lorsque l’on parle d’écologie, on a souvent tendance à oublier que la femme a une place prépondérante dans ce mouvement, et ce depuis ses débuts.

Lutter pour la préservation de l’environnement, c’est lutter contre la domination de l’homme sur la nature. (je mets un grand H mais ça se résume majoritairement à des hommes)

Être féministe, c’est lutter contre la domination de l’homme sur la femme.

L’écoféminisme, qui est la conjonction de l’écologie et du féminisme, est un mouvement qui prend de plus en plus d’ampleur, et en France comme ailleurs, on retrouve des figures du mouvement : Françoise d’Eaubonne (une des pionnières), Nathalie Kosciusko-Morizet, Cécile Duflot, Delphine Batho mais aussi Eva Joly, l’Américaine Carolyn Merchant, l’Indienne Vandana Shiva ou la Kenyane Wangari Muta Maathai.

L’activiste Greta Thunberg ou encore Camille Étienne quant à elles semblent également prôner l’écoféminisme, même si elles ne revendiquent pas leur appartenance à ce mouvement.

Sur LinkedIn, vous pouvez suivre également Stacy Algrain ou encore Gabrielle Piot, sur ce sujet.

Source : Getty images

Le patriarcat, symbole de la domination sur les femmes…

Tout d’abord, rappelons la définition du patriarcat : C’est une forme d’organisation sociale dans laquelle l’homme exerce le pouvoir dans le domaine politique, économique, religieux, ou détient le rôle dominant au sein de la famille, par rapport à la femme. En opposition donc au matriarcat.

Ça vous rappelle quelque chose ? C’est normal, notre société est patriarcale, et dans la plupart des régions du monde également.

Vous allez-vous dire « mais pourquoi est-ce qu’il nous parle de ça ? »

J’y viens plus bas. Déjà, voici quelques chiffres en France en 2022 :

  • 118 milliards d’Euros. Ce sont les pertes de richesse engendrées chaque année en raison des inégalités femmes-hommes. En résumé, c’est un manque à gagner énorme. [Source : Rapport sur le coût des inégalités en France, Fondation des femmes, 2022]
  • 96%. C’est le pourcentage d’hommes dans les personnes mises en cause pour meurtre. [Source : Le coût de la virilité par Lucile Peytavin, éditions Anne Carrière, 2022]
  • 86%. C’est le pourcentage de RDV médicaux pris par les femmes, pour leurs proches (notamment leurs enfants). C’est ce qu’on appelle la charge médicale, dérivée de la charge mentale. La dessinatrice Emmaclit en parle très bien ici. [Source : Doctolib, Twitter, 2022]

…doit disparaître

Je vous parle de ça parce qu’il est URGENT de remettre en cause la domination de l’homme sur la femme, de lutter contre les inégalités et le non-respect des minorités pour, in fine, remettre en cause la domination de l’homme sur la nature.

« Ni les femmes ni la terre ne sont des territoires de conquête. »

Les « Mujeres Creando » – groupe féministe anarchiste bolivien – scandaient haut et fort ce slogan dans les premières manifestations contre la pauvreté au début des années 2000, en Bolivie.

Les femmes, grandes perdantes de l’emploi

Sur les inégalités salariales par exemple – un rapport de l’ONU très récent datant de ce mois-ci est disponible ici (anglais) – on y observe :

Un écart plus élevé que prévu dans l’accès à l’emploi

L’Organisation Internationale du Travail (OIT) rappelle qu’une personne est considérée comme demandeuse d’emploi si elle a récemment recherché un travail, et si elle est disponible pour commencer un nouvel emploi rapidement.

Cependant, les femmes peuvent difficilement remplir ces conditions et être considérées comme demandeuses d’emploi. La raison ? Leur implication totalement disproportionnée dans les tâches domestiques, de gardes d’enfants et d’aide aux proches. Les femmes sont disponibles pour travailler mais elles manquent de temps pour chercher activement un emploi : Les statistiques officielles du chômage ne les prennent donc pas en compte.

Ça vous rappelle encore quelque chose ? C’est normal, ça s’appelle la charge mentale et de nombreuses femmes subissent cette charge, en France comme à l’étranger.

Des écarts plus importants dans les régions plus pauvres

À mesure que le revenu national diminue, l’écart entre les hommes et les femmes augmente. Dans les pays développés aux niveaux de revenus élevés, 9,6% des femmes souhaiteraient travailler, mais sont sans emploi, contre 7,4% des hommes. Le pire déficit d’emplois est observé dans les pays à faible revenu. Dans ces Etats, la part des femmes qui veulent travailler, mais n’ont pas d’emploi atteint 24,9%, contre 16,6% pour les hommes.

Des résultats « inquiétants » sur les disparités salariales

Toujours d’après l’OIT, En 2019, quand un homme gagnait un dollar de revenu du travail, une femme gagnait en moyenne 51 centimes dans le monde. Dans les pays à revenus faibles, les femmes perçoivent en moyenne 33 centimes pour un dollar gagné par des hommes.

Comment expliquer cela ?

Les femmes ont tendance à être surreprésentées dans certains types d’emplois vulnérables.

Par exemple, les femmes sont plus susceptibles d’aider leur ménage ou l’entreprise de leurs proches que d’occuper un emploi indépendant. Cette vulnérabilité, associée à des taux d’emploi plus faibles, a des répercussions sur les revenus des femmes.

La maternité, « facteur de plus faible participation » au marché du travail

Enfin, la maternité est un facteur majeur qui réduit la participation des femmes au marché du travail dans le monde.

Parmi les 25-54 ans, l’écart entre femmes et hommes dans la participation au marché du travail était de 29,2 points de pourcentage l’an dernier. Mais cet écart s’élève à 42,6 points de pourcentage pour les 25-54 ans ayant au moins un enfant âgé de moins de six ans. Dans ce groupe, la participation des femmes est de 53,1%, contre 95,7% pour les hommes. Bien évidemment, il existe des différences entre les pays, dépendant également du revenu national.

Les femmes sous-représentées en politique

Les femmes ne sont pas non plus épargnées, au pouvoir. La preuve avec cette infographie de l’INSEE :

Source : INSEE / 2019

2019 semble déjà loin, et pourtant encore en 2021 les chiffres sont véridiques. D’après ce rapport des collectivités locales de 2021, 11,4 % des femmes sont présidentes de conseils communautaires, 19,8 % des maires, 20,2 % des présidentes de conseils départementaux et 31,6 % de ceux des régions.

D’après l’Assemblée Nationale, en 2022, on trouve 215 femmes, sur 577 sièges. 37,3 % donc sont des femmes. Édifiant.

Pourtant, s’il y a bien un endroit où un changement profond est nécessaire, c’est bien en politique.

Pourquoi ?

Ce sont les gouvernements (et les instances associées) qui légifèrent. Sans législation, pas de cadre, et sans cadre, rien n’avance. De nombreuses entreprises se targuent de faire des efforts concernant leur impact environnemental. Et devinez quoi ? Il n’en est rien. Ces entreprises se conforment simplement à la loi. Sans ces lois, les entreprises ne feraient pas d’efforts.

Les agressions sexuelles, le SMIC, la pension de retraite… Sur tous les sujets ou presque, l’homme domine.

Maintenant que nous avons posé les bases du féminisme – qui je le rappelle n’est qu’une lutte pour l’égalité H/F, rien d’autre – nous allons pouvoir nous attaquer au cœur du sujet : l’écoféminisme.

Convergence des luttes

Au même titre qu’il est difficile de s’imaginer être féministe et homophobe par exemple, difficile de concevoir qu’on puisse être écolo sans être féministe. Et cette règle semble s’appliquer à toutes les luttes sociales de ce type.

Si je vous parle de ça, c’est que je souhaiterai rappeler que la justice environnementale sans justice sociale, c’est du jardinage. (Oui, j’ai adapté un peu la citation de Chico Mendes, vous ne m’en voudrez pas !)

Si vous regardez bien, les différents rapports sérieux qui sortent régulièrement, que ce soit le GIEC ou l’ONU, évoquent souvent des risques accrues pour certaines populations : seniors, enfants, femmes… Et ce pour différentes raisons (fragilité, mise en danger…).

Si on ne s’intéresse pas au climat (et à l’écologie d’une manière générale), on ne s’intéresse de facto pas réellement au sort des femmes, et plus généralement, aux personnes plus fragiles et/ou subissant une oppression. On exclu de ce fait toute notion de justice sociale.

Une récente étude de The Lancet (2022, en anglais) estime que les catastrophes naturelles augmentent drastiquement les violences basées sur le genre (femme et communauté LGBTQI+). Cela corrobore parfaitement la hausse de violence observée ces 20 dernières années après le passage de certains ouragans par exemple, comme Katrina en 2005 qui a fait plus de 2000 morts à la Nouvelle-Orléans aux USA. Dans les 6 mois qui ont suivi, et du fait de l’extrême pauvreté, des maisons inhabitées et des forces de l’ordre en sous-effectif, on a observé une hausse de 45% des agressions sexuelles. Le tremblement de terre de Canterbury en Nouvelle-Zélande en 2011 a aussi généré une hausse dramatique de cas de violences conjugales.

Cette étude révèle en réalité que les violences envers les femmes et les minorités ne sont pas dues à certaines catastrophes naturelles (exacerbées par le réchauffement climatique, comme je l’explique ici ou ) mais à l’instabilité générée par ces dernières.

« Les événements extrêmes ne sont pas eux-mêmes à l’origine de la violence sexiste, mais ils exacerbent plutôt les moteurs de la violence ou créent des environnements qui permettent ce type de comportement »

Kim van Daalen, chercheuse au département de santé publique et de soins primaires de l’université de Cambridge (Angleterre).

Concernant la communauté LGBTQI+, accusée d’être responsable de l’ouragan Katrina (que certains appelaient la « punition des dieux »), elle a été victime de discrimination, en se voyant refuser l’accès aux aides décernées par l’Agence fédérale de gestion des urgences. les personnes transgenres ont quant à elles subi des agressions physiques.

Les chercheurs ont aussi constaté qu’au Bangladesh, les pics de mariages forcés coïncidaient avec les fortes inondations survenues entre 1998 et 2004 dans ce pays d’Asie du Sud. L’appauvrissement induit par ces catastrophes naturelles a généré de nombreux mariages forcés, permettant aux familles de réduire les coûts familiaux. Et devinez qui paie les pots cassés ? Les jeunes filles, mineures la plupart du temps, forcées à s’unir à un homme.

Pour plus de renseignements, vous pouvez lire le rapport de l’ONU à ce sujet (en anglais).

Libération de la parole et mouvements féministes

Avec l’avènement de #MeToo et des différents mouvements féministes permettant aux femmes de prendre la parole, de dénoncer et de soutenir les victimes d’agressions sous toutes les formes, l’écoféminisme s’est vu propulsé sur le devant de la scène ces dernières années. Les derniers rapports du GIEC et les successions de problèmes environnementaux (notamment la forte sécheresse et les méga-feux de forêts de l’été 2022), couplé à l’émancipation de plus en plus grande des femmes de la domination masculine, promet de belles années à ce mouvement primordial pour la transition vers une société plus juste.

Principe du « Care »

Le second axe intéressant concernant l’écoféminisme, est ce qu’on associe au « Care » : On se recentre sur l’être humain et la réappropriation de sa relation à la nature et à son environnement, plaçant le care au centre du système.

Les femmes sont très majoritaires dans les professions associées aux « vertus féminines » : 97% des aides à domicile et des secrétaires, 90% des aides-soignants, 73% des employés administratifs de la fonction publique ou encore 66% des enseignants sont des femmes. Des métiers souvent peu rémunérés.

L’écoféminisme semble donc faire la part belle au principe plus « féminin » de prendre soin des autres. Et pour prendre soin des autres, il faut évidemment prendre soin de notre environnement.

« Plus je lis sur la crise du climat, plus je réalise à quel point le féminisme est crucial. Nous ne pouvons pas vivre dans un monde durable sans égalité entre les genres et les personnes. »

Greta Thunberg

Conclusion

L’écoféminisme n’est rien d’autre que le prolongement d’autres mouvements voulant améliorer les choses. Pourquoi se contenter de lutter contre le réchauffement climatique, quand on peut faire d’une pierre, deux coups et lutter contre les inégalités F/H et plus encore ?

Ce mouvement semble devenir une évidence pour bon nombre de militants, souhaitant à la fois vivre dans un monde plus durable mais également dans une société plus équitable.

Alors, une raison de plus de laisser aux femmes assez d’espace, afin d’aider dans la crise environnementale et sociale en cours et à venir ? Personnellement, j’ai mon avis là-dessus. Et vous ?

Ce site est un média indépendant (ni pub, ni contenu sponsorisé) et ne peut fonctionner que grâce à votre soutien !

N’hésitez donc pas à aller faire un tour sur mon compte Tipeee pour me soutenir financièrement.

Un simple partage sur vos internets, un commentaire… C’est déjà un super coup de pouce !

Média 100% indépendant,

sans publicité ni contenu sponsorisé !

 

Garanti sans Bolloré

« L’écologie sans justice sociale, c’est du jardinage. »